Le chat Hochet, mai 2014 à la Terrasse de Gutenberg
D’abord un avertissement solennel. Mes avocats m’ont instamment demandé de lire la mise au point suivante avant d’entamer les pourparlers avec Mme Hochet.
Le livre dont il est question ici n’est pas un livre d’anatomie animale. Il ne traite pas de la digestion, gestation, parturition du chat, de ses muscles sauteurs, du nombre de poils et de la nature des coussinets, pas plus qu’il n’avise sur les parasites (tiques et autres), maladies, traitements et médicaments afférents. On n’y trouvera aucune publicité, aucun conseil concernant les marques de croquettes et leur utilisation, pas plus que des recettes ou menus saisonniers et raisonnés pour la bestiole en question.
Enfin il ne s’agit pas non plus d’un cantique de louanges à chanter dans quelque église fondamentaliste naturaliste animalière ante-péché originel.
Il est donc demandé aux membres du public qui auraient pu se méprendre et s’attendraient à trouver les informations susmentionnées lors de cette conférence de quitter la salle dans un délai de dix secondes. Délai après lequel mes avocats ne pourront plus recevoir aucune réclamation.
J’ajoute en mon nom personnel que les personnes susceptibles d’allergie à la flexibilité, la cabriole littéraire, la galipette intellectuelle, à l’érudition maîtrisée, à l’amour, à l’humour enfin, risquent d’être fortement incommodées.
C’est que l’auteure s’est intéressée au chat qui hante l’esprit humain, celui qui se faufile dans les textes les plus littéraires, celui que l’histoire humaine condamne odieusement ou célèbre en majesté, l’objet de nos haines ou de nos amours, le chat à neuf vies, le chat qui circule dans nos têtes.
Et du coup, le chat est un prisme magnifique qui permet de mener des explorations en tout lieu. Il peut être un guide, qui vous fait découvrir les bas-fonds des villes comme ceux de l’âme humaine, qui vous ouvre les panoramas vertigineux des toits tout aussi bien que ceux de l’esprit humain.
L’auteure n’en perd pas de vue le chat réel. En effet, l’écriture de Stéphanie Hochet semble procéder de l’être même du chat, de son essence intime, du chat en soi, du chat pour soi, du chat soi. De même que le chat parcourt tout espace qui lui chante à sa guise toujours et souverainement, cette écriture circule parfaitement à l’aise au milieu des plus grands, saute en souplesse sur les pages révérées de la littérature, se pose où elle veut comme elle veut,
Érudite, elle ne s’encombre d’aucune lourdeur, à quoi bon, cette écriture procède de la parfaite sérénité et de la grâce du chat, qui n’a besoin que d’être pour exister. La queue du chat Hochet balance et titille au passage Baudelaire, Winston Churchill, Natsume Sôseki, Colette, Elia Kazan, Geluck etc. etc..., puis d’un saut grâçieux le chat Hochet s’en va voir ailleurs, et vous en restez comme deux ronds de flanc.
D’ailleurs maintenant que j’y songe, je trouve que l’auteure, en sa personne physique, tient aussi du chat. Je ne l’avais pas remarqué avant. À voir s’il s’agit là d’un effet passager, d’un envoûtement la visant elle, ou me visant moi.
J’en suis même venue à déceler dans les écrits antérieurs de Stéphanie Hochet une présence chat, un souffle chat, une sorcellerie chat, un tropisme chat, tout particulièrement dans Le néant de Léon, et La distribution des lumières. Nous y reviendrons.
Pierrette FLEUTIAUX, mai 2014.
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